3 jours au G 701
Valérie P. - Laurent D ;
Invité Thomas Floriot un ami du Club du Tarn, BE speleo
JOURNÉE N° 1
Le G 701 pour certains sonne comme une cavité prometteuse et pour d'autres un simple trou sans grande valeur, mais qui laisse quand même entrevoir l'espoir d'une belle exploration. Et pourquoi pas ! C'est agréable de voir les autres rêver, ils ont peut-être raison ! ?
Sans grande connaissance du milieu karstique, j'écoute avec attention ce que l'on me raconte. "Tu sens ce courant d'air, c'est impressionnant et son emplacement, il y a sûrement un lien avec les sources de la Nive !" "Tu as vu ce bassin-versant, ce trou doit être soumis à des crues régulières" "On va trouver le collecteur, mais il y aura du boulot !!"
Du boulot ! ! Le mot est faible, ou alors je me suis fait une idée de la désobstruction et de l'exploration bien trop idyllique. Quand je compare avec le Behia descendu quelques jours avant où l'on se promenait dans de grands boulevards somptueux jusqu’au bivouac à -500 sans se tordre dans tous les sens et que nous remontions telle une promenade du dimanche, 5 heures après le corps à l'air libre.
L'exploration devait être un jeu d'enfant exploré par des grands. Hé oui, je ne suis pas née à la bonne époque.
Nous partons donc avec une énergie débordante, un regain d'enthousiasme, nos outils de cheminots à la main et nous descendons en direction de la cavité située au bord du ruisseau d’Orion.
Au premier regard, ce trou donne une impression plutôt austère, où l'on peut sentir un air froid sortir d'un orifice don l’entrée n'est pas très large. Cela nous conditionne pour la suite...
Nous descendons ce petit boyau où l'eau a su jouer de son charme et sculpter de petites vasques sympathiques. Un bain de pieds froid sur quelques mètres et nous voilà arrivés en tête de puits. Après une courte descente, nous posons les baudriers et entamons la suite dans un enchevêtrement de blocs pour se diriger vers un boyau quasiment bouché, mais qu'importe un peu de forcing sur quelques mètres, une bonne dose de détermination pour passer, et le lombric sort de son trou !
Thomas reste à cet endroit pour élargir l’entrée, bien motivé à dégager tous ces petits cailloux pouvant nuire à son avancée.
Pour ma part, je m’échappe et poursuis sur une désescalade acrobatique de quelques mètres, pour ensuite me faufiler dans une faille qui diminue au fur et à mesure de ma progression.
Arrivé au terminus, il est temps pour moi de sortir les instruments de torture et d'en finir avec ces cailloux qui nous empêchent d'imaginer une suite surprenante.
À défaut d'avoir de quoi tirer, j’entaille avec détermination la roche à grands coups de marteau et de pointrole. Elle cède sous les coups acharnés et entrouvre un passage où l'on peut enfin se mettre debout. Alléluia !! c'est la délivrance, mais à quel prix ! Car juste le temps de savourer cette petite avancée que le méandre se referme quelques mètres après. Quelle déception. Toutefois. On peut apercevoir la suite, rien n'est perdu, car elle nous montre un passage étroit qui descend et prend un virage sur la droite, de quoi laisser encore un peu de mystère et d'imagination pour entrevoir la suite.
Peut-être y trouverons-nous une grande salle ou de magnifiques puits ou peut-être un actif que sait-on ?
Je suis brusquement arrêtée dans mes pensées par une voie, celle de Thomas qui vient m'avertir d'un orage. On sait qu'il n'est pas bon de s'aventurer dans une étroiture par temps de pluie surtout quand celle-ci se trouve près d'une rivière. Un orage ? Il plaisante ? Le temps de la réflexion qui ne dura qu'un quart de seconde, le temps de comprendre que ce n’était pas une blague, je remonte en forçant la gravité et en laissant derrière moi tous les outils. Comme si l'eau allait surgir des failles d'un moment à l'autre !!
Pas de panique Monique, après le passage du lombric, tu ne risques pas grand-chose ! Je descends donc pour prêter main forte. Je n'avais pas vraiment prêté attention à l’élargissement du boyau à la remontée, mais Thomas avait déjà bien travaillé. Tel un bulldozer il avait désobstrué tout le boyau. Le passage que nous passions en ramping forcé était maintenant un quatre pattes 2 étoiles qu'il voulait encore améliorer pour en gagner une troisième. Quel boulot, il est fou !!
Après avoir posé mon cerveau dans un coin nous voilà en train de creuser et de remplir des seaux de cailloux et de terres. Entre deux, mes pensées vagabondent "Mais pourquoi tu fais ça ? Mais qu'est-ce que tu fais là dans le froid à enlever des pierres qui à la prochaine crue viendront te narguer en revenant te boucher l'entrée"" Il veut reproduire l’entrée de la Verna ou quoi ?" " En plus, tu ne vas même pas y retourner dans ce trou !"
Je repense au bouquin que je lis et qui parle du stoïcisme, savourer l'instant présent se contenter des bonheurs simples… Eh… bien là, la seule, chose qui me procurait du bonheur en cet instant présent, c'était de m’acharner sur les grosses pierres dénichées dans cet amas de petits cailloux boueux et user de mes forces pour réussir à les sortir ! Comme quoi... On arrive toujours à trouver quelque chose pour se motiver ...
La fatigue se faisant sentir, nous décidons à ma grande joie de remonter. Dans le caca blocs, on peut apercevoir de l'eau qui n'était pas visible, et même inexistante à la descente, l'orage est là ?! L'eau s'engouffre dans les failles et à la remontée du puits, on peut voir des petits filets d'eau qui font leur apparition. Le boyau que nous empruntons à la remontée lui, est sec par chance.
Arrivé dehors, l'orage est bien présent, il est juste au-dessus de nos têtes, et déverse sur nous des trombes d'eau. On s’empresse de retirer les baudriers, on attend que cela passe. En vain ... Il est temps de remonter en laissant le matériel sur place ... Je perds mes poumons sur la pente herbeuse en essayant de suivre Thomas et arrive au camion soulagé de ne pas avoir été foudroyée.
JOURNÉE N° 2
Le soleil n'a pas refait surface, bien dissimulé derrière de gros nuages gris, mais par curiosité et aussi pour récupérer le matos nous redescendons au trou pour jeter un œil aux travaux après crue. Le cours d'eau a repris ses droits et coule de manière abondante, par chance le trou a la tête hors de l'eau. Nous consolidons le petit barrage pour que la prochaine crue ne condamne pas l'entrée et tous les efforts entrepris.
L'oreille penchée sur l'entrée de la cavité, un bruit sourd arrive jusqu’à nous., de l'eau ? Thomas décide d'entreprendre une descente.
Quelle bonne idée !!!
Entendre l'eau pour ma part me suffit à savoir où elle se trouve et ne pas y mettre les pieds. Mais la voie de la sagesse se fait vite écraser par la curiosité et je m’empresse de le rejoindre. Spectacle assuré, de magnifiques gerbes d'eau sortent de deux ou trois failles et remplissent le puits d'un petit lac où l'eau a siphonné l'entrée du laminoir.
On est certain maintenant qu'il n'est pas bon de rester dans ce trou par temps de pluie, mais aussi que l'eau ne s'infiltre pas seulement par l'entrée principale.
JOURNÉE N°3 Plus on est de fous, plus on creuse !
Une nouvelle recrue ! Laurent est au rendez-vous. Quelques jours auparavant nous sommes partis Thomas, Laurent et moi pour descendre la Cantinière, un gouffre toujours en explo qui descend à moins 200 et quelques choses. Ils ont du mérite ou tout simplement le goût de l'exploration pure pour aller farfouiller aussi profond ces spéléos.
Quand je repense à ce trou. Un gouffre rempli de merde !
Premier conseil : ne jamais regarder son collègue qui remonte sur la corde si tu ne veux pas finir aveugle en te prenant de la merde dans les yeux.
Deuxième conseil : tu ne te plaindras plus des cordes légèrement sales quand tu vois l'état de celles-ci. On se pose encore la question à savoir sur quoi nous sommes descendus ! Y avait-il une corde sous cet amas de boue ?
Voyons le côté positif, nous étions très contents d’en sortir et en prime avec un masque facial, plus bio que bio !
Mais où sont passés les jolis trous que nous équipions en début de semaine tel que le yéti l'EX 655, Etchar, et même Le Charlotte !!
Ce qui est sûr, c'est que cela n'a pas dégoûté Laurent qui nous a rejoint quelques jours après pour le G701.
Et nous voilà partis. On effectue la marche d’approche sous le soleil pour aller s'enfoncer dans ce trou qui me paraît maintenant beaucoup moins hostile. Il est temps d'aller régler son compte, à cette étroiture.
Nous avons notre maître d’œuvre, Thomas, qui fort de son expérience nous conditionne pour la suite de la désobstruction "Petit boyau tu deviendras grand" . Il avait raison, cela devient plaisant et bien plus confortable de passer à cet endroit « Le but est d’élargir pour y revenir ! » Mais qui voudrait y revenir, une question qui reste en suspens !
Les travaux validés par l'équipe, nous décidons de descendre pour regarder la suite.
Laurent s’attèle au terminus, tandis que Thomas décide d’élargir le reste de la cavité dans l’idée, je pense, d'en faire un boulevard, heureusement qu’il n’a pas de quoi faire des tirs, on serait déjà aux sources de la Nive. Laurent, tel Noé, nous ouvre un passage dans une faille qui n’a plus de secret pour lui.
Les choses intéressantes commencent. Pris par notre enthousiasme nous nous faufilons dans cette étroiture sans nous faire prier.
La suite est là, nous avançons sur quelques mètres pour tomber sur un puits, à mon grand désarroi, il n’est pas très profond (2 à 3 mètres) mais qu’importe, nous le désescaladons sans prendre la peine d’y poser une corde, sûrement trop pressée par l’idée de découvrir la suite. Arrivée en bas, plus rien… Tout ça pour ça ! Tant d’effort pour s’arrêter sur un puits borgne.
Je soulève une dalle bien lisse, je bouge quelques cailloux et la suite apparaît comme par magie… Ou presque. Un méandre de deux à trois mètres qui n’est pas très large s’ouvre devant nos yeux. Je m’y glisse en espérant ne pas m’y coincer et j’observe la suite.
Une petite salle où gît une mare d’eau qui s’engouffre dans une étroiture de 20 cm de large sur 60 cm de haut et une profondeur que je ne saurais déterminer.
La suite est ici sans aucun doute !
Valérie P.